Un rêve de Patricia Bourke

Il existe un lieu qui correspond à l'un de mes rêves. Ce lieu est à Liverpool. C'est le baptistère de la cathédrale catholique. Ce rêve ne m'est venu qu'une fois, il y a si longtemps que je ne peux me rappeler quand, mais il était si vif et demeure si distinct que j'ai toujours été capable d'y revenir en esprit et que je ne me souviens pas qu'il n'y ait eu un moment où je n'ai pu le faire si je le désirais. Mais maintenant je sais qu'il existe un lieu qui correspond à mon rêve et je n'ai plus le besoin de le visualiser puisque j'ai l'assurance de sa concrétisation. Il est solidement construit, et à moins qu'une bombe démente ou un tremblement de terre exceptionnel le détruise, il est là, à ma portée, pour peu que j'aille à Liverpool. Je peux entrer dans le baptistère, et remplir mes yeux, car ce lieu pur est la concrétisation de ce rêve que j'ai fait il y a si longtemps. Ce baptistère a trois petites fenêtres dans ses murs d'ivoire. La pièce de mon rêve n'avait pas de fenêtre mais était infusée de lumière. Elle était circulaire et les murs étaient d'un blanc d'ivoire irradiant. Au centre était un autel, sans rien dessus, ni vase, ni cierge, rien, mais il n'y avait aucun sentiment de vide. Personne d'autre que moi, mais aucun sentiment de solitude. Marcher lentement autour de l'autel était tout ce que je pouvais faire et tout ce que je voulais faire. Aucune idée d'obligation ni de contrainte mais un parfait contentement. Comme son prototype rêvé le baptistère est circulaire et les murs ivoire, d'un blanc de lait, et au centre de la pièce, pas d'autel mais des fonts baptismaux aussi simples et aussi dépouillés que la pièce elle-même. Qu'il y ait une porte, cela je le sais, parce que j'ai bien dû m'y tenir pour regarder à l'intérieur.

Mon rêve n'en est pas moins mon rêve parce que de l'avoir vu concrétisé, je sais qu'il est partagé par d'autres. C'est au contraire immensément rassurant que ce lieu d'innocence soit là, comme sur la carte, et qu'il ait une réalité indépendante de moi. Je n'ai pas besoin de m'en soucier, ni de pleurer qu'il ait disparu. Je n'ai pas besoin de développer une disposition intérieure spéciale ni de cultiver une sainteté personnelle pour sauvegarder ce lieu saint visité une fois en rêve, parce qu'il existe réellement, ce lieu de la perle faite aussi solidement que l'homme moderne puisse faire, et destinée, on l'espère, à durer aussi longtemps que les monuments les plus anciens. Le voilà, ce monument extérieur et visible de la grâce intérieure et invisible, cette pureté qui ne peut être saisie, conservée, encore moins consommée, mais qui existe par elle-même et pour toujours, une facette de Dieu.

Patricia Bourke Une icône en patchwork,

« Ce tranquille lieu saint »

(traduction Anne-Marie Désert)

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