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Romeo et Juliette
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- Catégorie : Théâtre
- Date de publication sur Atramenta : 10 mars 2011 à 13h29
- Dernière modification : 21 octobre 2016 à 15h11
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- Longueur : Environ 87 pages / 29 734 mots
- Lecteurs : 58 508 lectures + 9 149 téléchargements
Romeo et Juliette
Scène XVII
La cellule de frère Laurence.
Entrent Laurence et Paris.
LAURENCE
Jeudi, seigneur ! le terme est bien court.
PARIS
Mon père Capulet le veut ainsi, et je ne retarderai son empressement par aucun obstacle.
LAURENCE
Vous ignorez encore, dites-vous, les sentiments de la dame. Voilà une marche peu régulière ; et qui ne me plaît pas.
PARIS
Elle ne cesse de pleurer la mort de Tybalt, et c’est pourquoi je lui ai peu parlé d’amour ; car Vénus ne sourit guère dans une maison de larmes. Or son père voit un danger à ce qu’elle se laisse ainsi dominer par la douleur ; et, dans sa sagesse, il hâte notre mariage pour arrêter cette inondation de larmes. Le chagrin qui l’absorbe dans la solitude pourra se dissiper dans la société. Maintenant vous connaissez les raisons de cet empressement.
LAURENCE, à part
Hélas ! je connais trop celles qui devraient le ralentir ! (Haut.) Justement, messire, voici la dame qui vient à ma cellule. (Entre Juliette.)
PARIS
Heureux de vous rencontrer, ma dame et ma femme !
JULIETTE
Votre femme ! Je pourrai l’être quand je pourrai être mariée.
PARIS
Vous pouvez et vous devez l’être, amour, jeudi prochain.
JULIETTE
Ce qui doit être sera.
LAURENCE
Voilà une vérité certaine.
PARIS, à Juliette
venez-vous faire votre confession à ce bon père ?
JULIETTE
Répondre à cela, ce serait me confesser à vous.
PARIS
Ne lui cachez pas que vous m’aimez.
JULIETTE
Je vous confesse que je l’aime.
PARIS
Comme vous confesserez, j’en suis sûr, que vous m’aimez.
JULIETTE
Si je fais cet aveu, il aura plus de prix en arrière de vous qu’en votre présence.
PARIS
Pauvre âme, les larmes ont bien altéré ton visage.
JULIETTE
Elles ont remporté là une faible victoire : il n’avait pas grand charme avant leurs ravages.
PARIS
Ces paroles-là lui font plus d’injure que tes larmes.
JULIETTE
Ce n’est pas une calomnie, monsieur, c’est une vérité ; et cette vérité, je la dis à ma face.
PARIS
Ta beauté est à moi et tu la calomnies.
JULIETTE
Il se peut, car elle ne m’appartient pas…Êtes-vous de loisir, saint père, en ce moment, ou reviendrai-je ce soir après vêpres ?
LAURENCE
J’ai tout mon loisir, pensive enfant… Mon seigneur nous aurions besoin d’être seuls.
PARIS
Dieu me préserve de troubler la dévotion ! Juliette, jeudi, de bon matin, j’irai vous réveiller. Jusque-là, adieu, et recueillez ce pieux baiser. (Il l’embrasse et sort.)
JULIETTE
Oh ! ferme la porte, et, cela fait, viens pleurer avec moi : plus d’espoir, plus de ressource, plus de remède.
LAURENCE
Ah ! Juliette, je connais déjà ton chagrin, et j’ai l’esprit tendu par une anxiété inexprimable. Je sais que jeudi prochain, sans délai possible, tu dois être mariée au comte.
JULIETTE
Ne me dis pas que tu sais cela, frère, sans me dire aussi comment je puis l’empêcher. Si dans ta sagesse tu ne trouves pas de remède, déclare seulement que ma résolution est sage, et sur-le-champ je remédie à tout avec ce couteau. (Elle montre un poignard.) Dieu a joint mon cœur à celui de Roméo ; toi, tu as joint nos mains ; et, avant que cette main, engagée par toi à Roméo, scelle un autre contrat, avant que mon cœur loyal, devenu perfide et traître, se donne à un autre, ceci aura eu raison de tous deux. Donc, en vertu de ta longue expérience, donne-moi vite un conseil ; sinon, regarde ! entre ma détresse et moi je prends ce couteau sanglant pour médiateur : c’est lui qui arbitrera le litige que l’autorité de ton âge et de ta science n’aura pas su terminer à mon honneur Réponds-moi sans retard ; il me tarde de mourir si ta réponse ne m’indique pas de remède !
LAURENCE
Arrête, ma fille ! j’entrevois une espérance possible, mais le moyen nécessaire à son accomplissement est aussi désespéré que le mal que nous voulons empêcher. Si, plutôt que d’épouser le comte Paris, tu as l’énergie de vouloir te tuer, il est probable que tu oseras affronter l’image de la mort pour repousser le déshonneur, toi qui, pour y échapper, veux provoquer la mort elle-même. Eh bien, si tu as ce courage, je te donnerai un remède.
JULIETTE
Oh ! plutôt que d’épouser Paris, dis-moi de m’élancer des créneaux de cette tour là-bas, ou d’errer sur le chemin des bandits ; dis-moi de me glisser où rampent des serpents ; enchaîne-moi avec des ours rugissants ; enferme-moi, la nuit, dans un charnier, sous un monceau d’os de morts qui s’entrechoquent, de moignons fétides et de crânes jaunes et décharnés ; dis-moi d’aller, dans une fosse fraîche remuée, m’enfouir sous le linceul avec un mort ; ordonne-moi des choses dont le seul récit me faisait trembler et je les ferai sans crainte, sans hésitation, pour rester l’épouse sans tache de mon doux bien-aimé.
LAURENCE
Écoute alors : rentre à la maison, aie l’air gai et dis que tu consens à épouser Paris. C’est demain mercredi. Demain soir, fais en sorte de coucher seule ; que ta nourrice ne couche pas dans ta chambre ; une fois au lit, prends cette fiole et avale la liqueur qui y est distillée. Aussitôt dans toutes tes veines se répandra une froide et léthargique humeur : le pouls suspendra son mouvement naturel et cessera de battre ; ni chaleur ni souffle n’attesteront que tu vis. Les roses de tes lèvres et de tes joues seront flétries et ternes comme la cendre ; les fenêtres de tes yeux seront closes, comme si la mort les avait fermées au jour de la vie. Chaque partie de ton être, privée de souplesse et d’action, sera roide, inflexible et froide comme la mort. Dans cet état apparent de cadavre tu resteras juste quarante-deux heures, et alors tu t’éveilleras comme d’un doux sommeil. Le matin, quand le fiancé arrivera pour hâter ton lever il te trouvera morte dans ton lit. Alors, selon l’usage de notre pays, vêtue de ta plus belle parure, et placée dans un cercueil découvert, tu seras transportée à l’ancien caveau où repose toute la famille des Capulets. Cependant, avant que tu sois éveillée, Roméo, instruit de notre plan par mes lettres, arrivera ; lui et moi nous épierons ton réveil, et cette nuit-là même Roméo t’emmènera à Mantoue. Et ainsi tu seras sauvée d’un déshonneur imminent, si nul caprice futile, nulle frayeur féminine n’abat ton courage au moment de l’exécution.
JULIETTE
Donne ! Eh ! donne ! ne me parle pas de frayeur.
LAURENCE, lui remettant la fiole.
Tiens, pars ! Sois forte et sois heureuse dans ta résolution. Je vais dépêcher un religieux à Mantoue avec un message pour ton mari.
JULIETTE
Amour donne-moi ta force, et cette force me sauvera. Adieu, mon père ! (Ils se séparent.)
Table des matières
- CHŒUR Env. 1 page / 117 mots
- Scène I Env. 7 pages / 2278 mots
- Scène II Env. 3 pages / 998 mots
- Scène III Env. 4 pages / 1090 mots
- Scène IV Env. 4 pages / 1092 mots
- Scène V Env. 6 pages / 1761 mots
- Scène VI Env. 2 pages / 406 mots
- Scène VII Env. 6 pages / 1932 mots
- Scène VIII Env. 3 pages / 938 mots
- Scène IX Env. 6 pages / 1961 mots
- Scène X Env. 3 pages / 809 mots
- Scène XI Env. 2 pages / 350 mots
- Scène XII Env. 6 pages / 2049 mots
- Scène XIII Env. 5 pages / 1410 mots
- Scène XIV Env. 5 pages / 1723 mots
- Scène XV Env. 1 page / 327 mots
- Scène XVI Env. 7 pages / 2374 mots
- Scène XVII Env. 4 pages / 1143 mots
- Scène XVIII Env. 2 pages / 498 mots
- Scène XIX Env. 2 pages / 552 mots
- Scène XX Env. 2 pages / 333 mots
- Scène XXI Env. 5 pages / 1312 mots
- Scène XXII Env. 3 pages / 846 mots
- Scène XXIII Env. 1 page / 270 mots
- Scène XXIV Env. 10 pages / 3165 mots
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