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L'ombre d'une autre
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- Catégorie : Littérature sentimentale
- Date de publication sur Atramenta : 11 janvier 2017 à 11h50
- Dernière modification : 21 septembre 2018 à 11h03
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- Longueur : Environ 860 pages / 292 003 mots
- Lecteurs : 3 251 lectures + 1 249 téléchargements
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L'ombre d'une autre
Chapitre 28
Le bruit du monstre qu’il appelait voiture me parvint alors que je m’apprêtais à téléphoner à Suzy. Je repoussai ce moment sans une once d’hésitation pour me précipiter dans les escaliers et lorsqu’il franchit la porte et gravit les premières marches sans me lâcher du regard, il me fut bien difficile de détourner le regard.
— Bonjour ! Ai-je passé l’examen d’entrée ?
Je sortis de mon extase pour lui lancer un regard de gentille idiote.
— Hein ?
— Bonjour, serait plus approprié, répliqua-t-il, diverti par mon comportement statufié.
Je bredouillai un vague bonjour.
— Que faites-vous debout dans ces escaliers ?
— Vous n’allez pas recommencer ! Un père j’en ai déjà un, et vous savez où il se trouve maintenant.
— Au vu de ce qu’il s’est passé cette nuit, je suis en droit de m’inquiéter.
— Oh…
— Oui, oh ! Mais qu’est-ce qui vous a pris ?
Je me sentis bêtement prise à défaut, et répondis confuse ;
— Je n’arrivais pas à dormir. La notice indique que l’on peut en prendre jusqu’à trois.
— Reparti sur 24 h, non en même temps ! Les doses que vous avez absorbées sont calculées pour un homme adulte de constitution normale. Vous pesez soixante-dix kilos ? Non, répondit-il à ma place, mais quarante-deux, quarante-trois, tout au plus !
Je me tassai davantage devant son emportement. Malgré tout, je perçus une réelle inquiétude derrière ses propos. Mais qu’il parvienne à définir mon poids avec autant de précision m’agaça.
— Je ne suis pas suicidaire si c’est cela qui vous inquiète ! Dans ce cas, j’aurais avalé ces fichues pilules avec votre meilleur vin et aurais fini l’opération par un petit plongeon dans la piscine. Et maintenant, vous allez me dire que vous les avez comptées, juste au cas où. Ouhhh, mais dites-moi ? Que serait une belle journée sans un bon café et une jolie leçon de morale !?
— Ne le prenez pas comme cela ! Si ce n’est pas les médicaments, c’est votre chute qui aurait pu vous blesser. Bien sûr que je les ai comptées ! Que vouliez-vous que je fasse d’autre ? Figurez-vous que je ne suis pas médecin, et je devais être réactif en cas de surdose. Mais David m’a affirmé que vous ne courriez aucun risque. La dose prise était importante vu votre corpulence, mais pas dangereuse. Il m’a uniquement conseillé de vous surveiller. Il n’y avait rien d’autre à faire. Un somnifère est un psychotrope, cela agit sur le cerveau, ce n’est donc pas un bonbon !
— Oh…
— Vous aussi vous avez votre phrase fétiche on dirait, reprit-il plus doucement, abandonnant son exacerbation.
— Vous êtes resté dans ma chambre… toute la nuit ?
— Une grande partie, oui.
— Je ne voulais pas vous causer autant d’ennuis. Je suis navrée.
— Ce n’est rien. La prochaine fois que vous décidez de vous envoyer sur un petit nuage, essayez de ne pas vider la boîte. Les anxiolytiques sont utiles et efficaces s’ils sont utilisés à bon escient.
— Il y a peu de chance que cela se reproduise, je les ai jetés !
— J’en suis ravi. Et maintenant, si vous pouviez espacer vos tribulations nocturnes, vous me rendriez un énorme service. Ce n’est pas que je suis contre vos débordements d’imagination, seulement mes heures de sommeil commencent à me manquer et j’aimerais bien les retrouver rapidement, poursuivit-il un sourire aux lèvres tandis que nous gravîmes les dernières marches.
J’oscillai entre rougeur excessive et pâleur inquiétante. J’étais à moi seule, un vrai réservoir à gaffes.
— Ce qui est surprenant, c’est que vous avez l’air d’avoir récupéré de cette nuit ainsi que des derniers jours, c’est une bonne nouvelle. Je suis heureux de revoir ces couleurs sur votre visage.
— Je vais mieux. Merci de votre sollicitude, cela me touche… sincèrement. Je me sens encore légèrement fébrile, mais rien d’alarmant. Martha a été un ange avec moi ce matin. Elle m’a fait boire un truc affreux, mais au moins ça a eu le mérite de dissiper les effets des somnifères. Je n’ai même pas osé demander ce qu’il y avait dedans, grimaçai-je.
— Et c’est préférable, croyez-moi !
— Pourquoi ? Vous y avez déjà eu droit ?
— Oui, mais pas pour le même type de dégrisement.
— Oh… Je ne savais pas que vous aimiez autant l’alcool. Vous cachez bien votre jeu, m’amusai-je à répondre.
— Moi aussi j’ai eu ma période teenager rebelle, ajouta-t-il malicieux.
— Vous sous-entendez quoi par là !?
— Qu’il est temps de vous préparer ! Je me change et on prend la route dans un quart d’heure au maximum si l’on veut arriver à l’heure.
Je le suivis en trottant vers l’unique partie de la maison que je n’avais encore jamais empruntée. Je l’apostrophai, retrouvant mon sérieux.
— Attendez ! Si vous, vous en avez fini avec moi, la réciproque ne s’applique pas ! Pourquoi vous ne m’avez rien dit ? Pourquoi m’avoir caché que c’est vous qui m’avez sortie de ce cauchemar l’autre nuit ? Vous pourriez au moins vous arrêter lorsque je vous parle !
— Vous devriez aller vous préparer.
— Ce n’est pas la bonne réponse !
— Et c’est celle que je vous donne.
Je le suivis toujours dans l’attente d’une réaction.
— Je sais que c’est vous ! Cette nuit me l’a prouvée et vous ne pouvez pas…
L’incongruité du lieu s’imposa soudainement à moi, et je me sentis rougir jusqu’aux oreilles me stoppant ainsi net dans ma course. On se trouvait tout bonnement dans sa chambre. Me trouver dans cet espace dans lequel je n’aurais jamais dû entrer me pétrifia instantanément. Son refuge, sa tanière. Ce lieu que je m’étais toujours interdit d’imaginer se matérialisa soudain. Je me détournai, gênée par des pensées qui, elles aussi, n’auraient jamais dû s’imposer ni même m’effleurer. Je tentai de chasser de mon esprit ces images furtives, mais déjà fortement ancrées, de cette pièce, très grande, lumineuse, chaleureuse, indécemment accueillante. Ce lit posé face aux baies vitrées dominant ainsi l’immensité des plaines et des montagnes. Seule la rive nord du lac était visible, son opposé discrètement dissimulé dans le contrebas de la pente. Cette alternance reposante entre le beige du dessus-de-lit et le blanc des murs. Ce parquet clair, reflétant les rayons chaleureux du soleil. Ce fauteuil Club posé en une volontaire négligence dans un des angles de la pièce. Cette mezzanine logeant derrière son garde fou de verre, son bureau, ses bibliothèques, éclairés par les larges ouvertures des fenêtres, allant jusqu’à la croisée, donnant à l’ensemble une luminosité douce et diffuse. Ce mélange harmonieux de bois, de cuir, de verre et d’inox brossé. Cette explosion de particules citronnées, boisées, suspendues, enveloppantes, renversantes, captivantes…
— Vous l’avez encore fait exprès !
— Exactement ! C’est bien le seul endroit où je suis certain que vous ne me suivrez plus. Nous avons deux bonnes heures de route devant nous. Vous aurez tout le loisir de me questionner, reprit-il doucement face à mon air décomposé. Ce n’est pas le bon moment, sauf si vous tenez vraiment à entrer dans cette pièce, mais je n’y crois guère.
— Vous ne pouvez pas me demander au lieu d’utiliser ce semblant de stratagème !? Quand cesserez-vous de me manipuler ?
— Je le ferais, le jour où vous m’écouterez.
Il referma lentement sa porte me laissant ballante, le cerveau frôlant le QI d’un mollusque.
Je ne desserrai pas les mâchoires, les vingt premiers kilomètres, jonglant toujours avec ce sentiment de gêne et ma fierté. Je ravalai bien vite cette dernière, extrêmement mal placée. Qui prenait de son temps ? Qui acceptait de m’accompagner ? Même si sa présence était dominée par une puissante envie de vérité. Car ce que je lui apprendrais sur moi lui en apprendrait un peu plus sur la disparition de Melinda. Nous avions besoin l’un de l’autre pour cette seule raison…
— Vous êtes anormalement silencieuse. Vous avez décidé de « bouder » encore longtemps ?
— Les enfants boudent ! Moi, je réfléchis.
— Soit. Disons que vous réfléchissez, alors. Je ne voudrais pas vous contrarier. Qu’est-ce qui occupe vos pensées au point d’en oublier votre leitmotiv de tout à l’heure ?
— Je n’étais pas en train de parader et de fanfaronner devant votre porte ! Et pour répondre à votre question, c’est vous qui occupez mes pensées !
Il ne se départait pas de son sourire que je lui rendis, soumise face à tant de légèreté. Je me tournai vers lui, les genoux sous le menton, à l’observer.
— Je me disais simplement que vous en faites plus pour moi que moi pour vous. Je me demandais combien de temps vous alliez tenir. Je suis un véritable poison depuis que je suis chez vous.
— Ne vous inquiétez pas, je crois que j’ai l’antidote.
— Qui est… ?
— C’est hors de question que je vous révèle quoi que ce soit. Vous seriez capable de trouver un contre-antidote.
— Ça n’existe pas !
— C’est bien ce que je dis !
Je levai les yeux, amusée. Pendant quelques secondes, un silence s’installa, puis il reprit la parole posément.
— Si je ne vous ai rien dit concernant l’autre nuit, c’est simplement parce que vous me l’aviez demandé.
Je me redressai, attentive.
— Lorsque vous êtes venue me voir en ville, les derniers mots que vous avez prononcés étaient que vous ne vouliez plus ni me voir ni m’entendre. Alors, je vous ai écoutée. Ma présence à elle seule vous était insupportable au point de ne plus l’accepter.
Je le regardai plus attentivement, essayant de déchiffrer ses expressions, jusqu’à ce que je comprenne enfin ce qu’il essayait de me dire.
— Vous me croyez si je vous dis que j’ai ressenti tout le contraire de ce que vous venez d’avancer.
— Ai-je le choix ? questionna-t-il doucement.
— Absolument pas ! C’est vous qui êtes resté à mes côtés pendant ces deux nuits… Je sentais une présence dans la chambre.
Il acquiesça d’un léger mouvement de tête, un sourire, ou plutôt une moue de repentir, au coin des lèvres.
— Je n’ai trouvé que ce moyen pour vous aider sans que vous vous en rendiez compte. C’est en voyant votre colère dans mes bureaux que j’ai réalisé que je vous avais profondément blessée… Je comprends aussi que je vous ai fait vivre un enfer.
Il se tourna vers moi, accrochant mon regard quelques secondes puis le reporta sur la route, pour poursuivre d’une voix légèrement éraillée.
— Je regrette réellement ce que je vous ai infligé, je n’en avais pas le droit…
Ma gorge se serra sous l’effet de l’émotion. Comment pourrais-je lui en vouloir ? Je ne le pouvais pas, tout simplement. Il avait déjà bien assez été puni avec mes mésaventures et j’en ressentis une certaine culpabilité.
— Vous ne pouviez pas savoir ce que j’avais vécu étant enfant… Je me suis bien arrangée pour ne rien laisser transparaître. Racontez-moi ce qu’il s’est passé cette nuit… s’il vous plaît. J’ai besoin de savoir. Je n’en peux plus de toutes ces inconnues.
Je restai suspendue à ses lèvres, guettant ses premiers mots.
— Je suis rentré de la ville, mais vous étiez déjà partie avec le véhicule du ranch. Max revenait d’excursion et lorsqu’il a appris que vous étiez sortie, ça l’a fortement inquiété. La région subissait depuis la veille des orages assez violents. Mais ceci, vous l’ignoriez.
— Non, j’étais au courant. Vicki m’avait prévenue.
— Et vous y êtes allée ? Pourquoi cela ne me surprend pas… ?
Je haussai les épaules, acceptant sa remarque sans pouvoir la contredire.
— J’ai attendu qu’il raccompagne le groupe en ville. Nous ne voulions pas les alarmer inutilement, surtout Tyler.
— Et vous avez pris la bonne décision. Je n’avais pas prévenu Tyler que j’étais de retour. Je voulais lui envoyer un message par radio, mais y ai renoncé.
— Pourquoi cela ?
— Honnêtement, je ne souhaitais pas vraiment que vous entendiez ce que j’avais l’intention de lui dire. Vous avez des mouchards partout. Même vos radios sont sur écoute. Pire que l’œil de Moscou, marmonnai-je.
— J’imagine qu’il était préférable que je n’entende pas, répondit-il un léger sourire aux lèvres.
— Tyler est un être extraordinaire, en qui j’ai une confiance absolue. Il a toujours été présent pour moi, m’a toujours soutenue depuis notre arrivée chez vous.
— Je le sais, Samuelle. Vous n’avez pas à vous justifier de quoi que ce soit. C’est votre vie. Je n’ai pas et je ne vais pas vous juger.
— Il est une des rares personnes à connaître mon histoire. Il n’est qu’un ami. Cher, mais mon ami, m’entendis-je préciser.
Je crus voir son visage se détendre, avant qu’il ne reprenne.
— Vous étiez susceptible de rentrer d’un moment à l’autre. Seulement, la nuit tombait et vous ne donniez aucune nouvelle. Jerry, Max et moi sommes partis à votre recherche alors que l’orage battait déjà. Max est un pisteur. Il est… particulier et a toute ma confiance. J’étais certain qu’il me conduirait à vous. Ou du moins, je voulais y croire. L’erreur n’était pas acceptable, et pouvait vous être fatale. Le temps jouait contre nous. Je ne suis pas homme de foi, mais j’ai prié pour qu’il ne vous soit rien arrivée et que l’on vous retrouve rapidement. Passé la clairière, Max a tout de suite aperçu vos affaires dissimulées sous un rocher. Et toujours aucune trace de votre présence. Le soulagement que nous avons ressenti s’est vite transformé en une véritable appréhension. La rivière rageait en contrebas, et la pensée que vous ayez basculée s’est très rapidement installée. Je crois que les deux minutes qui ont suivi ont été les pires que j’ai connues depuis bien longtemps. Ensuite, l’on vous a découverte inconsciente sur ce pont. Je ne sais pas si c’est le soulagement ou l’inquiétude qui m’ont fait avancer vers vous à ce moment-là.
Il prononça cette dernière phrase dans un murmure à peine audible. Je ne le quittai pas des yeux, émue par son récit, par cette peur, ce désarroi, cette impuissance qui l’avaient habité. Son visage aujourd’hui, en gardait encore l’empreinte. Je pris conscience que si cette nuit avait été un enfer pour moi, elle l’avait également été pour lui.
— Le plus difficile était de vous atteindre. Le pont tanguait dangereusement et vous pouviez basculer à tout moment. Votre petit gabarit, sans vous vexer, m’a été utile.
— M’a… ?
Il ne releva pas et poursuivit.
— Nous avons rebroussé chemin et vous avons portée jusqu’à la voiture…
— Vous ne me dites pas la vérité, l’interrompis-je doucement.
Il me lança un regard surpris.
— Il n’y a pas de place pour un « nous » dans cette partie de l’histoire.
— C’est vrai… c’était la seconde nuit où je manquais de vous perdre. Je vous ai enveloppée avec ma veste, mais vous étiez gelée… vos doigts, vos mains, votre visage, et je ne pouvais rien faire pour vous réchauffer. Vous étiez si pâle, si fragile. Vous paraissiez tellement vulnérable…
J’accrochai un instant son regard, les mots étant inutiles. De toute façon, j’avais la gorge tellement nouée que c’est tout juste si un filet d’air parvenait à s’y faufiler.
— Nous avons regagné le ranch. David, que nous avions prévenu pas radio, nous y attendait déjà. Aidés de Martha et Vicki, ils vous ont débarrassé de vos vêtements et prodigué les soins nécessaires. Le reste de la nuit, je l’ai passé à vos côtés. J’aurais aimé que vous ne l’appreniez pas.
— Sauf que je le sais maintenant. J’ai senti une présence à mes côtés, même si je me croyais toujours dans ces bois. C’est votre main qui s’est posée sur mon front. Je me souviens… En fait, je l’ai toujours su. Vous ne m’avez rien caché.
Spontanément, je me penchai vers Mark et posai lentement ma tête contre son épaule.
— Aujourd’hui, vous n’êtes pas mon patron ni un partenaire. Vous êtes ma force, précieuse et nécessaire. Je ne serais pas là sans vous, murmurai-je. Ne me repoussez pas, s’il vous plaît. Je souhaite que l’on oublie cette distance, toutes nos limites, juste une minute, rien qu’une minute…
— Vous m’avez demandé également de vous oublier, mais ça, je ne le peux pas, ajouta-t-il dans un bruissement que je l’entendis à peine.
Son souffle, ses lèvres effleurant mes cheveux, sa main qui enferma la mienne furent mes compagnons de voyage la dernière heure que dura le trajet sans qu’aucun mot ne vienne déranger ce moment.
— Mademoiselle Lookwood, Monsieur, je vous remercie pour votre ponctualité, je n’ai que très peu de temps à vous accorder ! Le docteur Marcott m’a expliqué brièvement les raisons de votre visite. Il m’a cependant recontacté pour éclaircir le point évasif concernant la partie sur « vos souvenirs par procuration ». Vous pouvez m’en dire un peu plus ?
Je m’attendais à ce que le cabinet du docteur James soit plus spacieux. La vue de cet espace spartiate, dénué d’une quelconque touche d’humanité, triste et sombre à souhait était déprimante. Le reflet exact du docteur.
Pour la énième fois, je racontais tout ce qui s’était passé depuis mes neuf ans jusqu’à mon arrivée au ranch. Ces souvenirs qui revenaient en force alors même que je ne connaissais ni les lieux ni les habitants. Mark complétait mon discours. C’était une situation étrange, comme si elle ne me concernait pas, ou plus. J’avais tu mon histoire depuis si longtemps que je la croyais morte. Mes fantômes du passé prenaient une forme dont je ne me serais jamais doutée. Et pourtant…
— Êtes-vous épileptique, Mademoiselle ? enchaîna-t-il, me déstabilisant au passage par son entrée en matière peu orthodoxe. Je vous pose la question, car l’épilepsie provoque tout un panel de troubles mentaux. Ils ne sont pas tous inquiétants et graves, mais peuvent être handicapants dans la vie quotidienne.
— Non. S’il y a une chose dont je suis certaine, c’est bien de cela. Mes grands-parents m’ont fait passer toute une batterie de tests lorsque j’étais enfant.
— Pour quelles raisons ?
— Mon comportement… inquiétait le corps enseignant, hésitais-je.
— Votre comportement !?
— Oui, admis-je de mauvaise foi, j’avais quelques difficultés d’adaptation et d’intégration après la mort de mon père. Il avait été mon seul repère et point d’équilibre.
— Vous avez subi une thérapie alors !
— Non, rien de tout cela. Mes grands-parents ne croyaient pas à ce genre de médecine. Médicalement parlant, j’étais en bonne santé. Ils étaient persuadés qu’en vivant dans un environnement stable, tout allait s’arranger. Le temps leur a donné raison.
— Il semblerait que leur théorie n’ait pas tenu.
— Je vais parfaitement bien !
— Jusqu’à il y a quelques jours, oui ! Savez-vous ce qu’est la mémoire, Mademoiselle ? reprit-il soudainement me laissant avec ce sentiment désagréable d’être cataloguée de façon intempestive.
— C’est l’aptitude à conserver et restituer les événements passés.
— C’est bien plus. La mémoire est une machine subtile, extraordinaire qui nous permet de replonger à loisir dans nos souvenirs, mais également nos connaissances. C’est un puits remarquable de connaissances, et il en jaillit un flot d’information, au moment même où on le désire. La mémoire est dotée de capacités quasi illimitées, mais il faut apprendre à les optimiser ! Nous avons cette chance, ou ce don de pouvoir la contrôler, du moins jusqu’à ce que cette mécanique bien précise s’enraye. Là, c’est un tout autre problème. Dans un cas de syndrome de reviviscence ou mémoire traumatique dans votre cas, les symptômes sont tous réunis ; pensées récurrentes sur les violences, ruminations, souvenirs intrusifs de tout ou partie de l’événement pouvant entraîner des sensations de douleurs, bruits, paroles, flash-back, illusions sensorielles, cauchemars, et qui font revivre à l’identique tout ou partie du traumatisme et reproduisent une détresse et une terreur similaires à celles vécues initialement. Votre conscience est envahie en quelque sorte par des réminiscences intrusives, et vous vous sentez agressée.
Il parlait avec emphase dévorante de passion. J’avais quelques craintes qu’il ne s’égare et ne me perde au passage dans des explications un tantinet trop complexes pour mon niveau. Mais j’étais soulagée de constater qu’il gardait en tête qu’il ne s’adressait pas à des confrères, mais à des individus lambda.
— Le dossier que j’ai là vous concerne. Il indique que vous avez été admise dans mon service après avoir subi un traumatisme crânien. Ce n’est pas le plus grave, mais il n’en reste pas moins important.
— Pourrais-je le consulter ? demandai-je en désignant le dossier.
— Vous pourrez même repartir avec une copie. Ce n’est pas la procédure, mais j’estime que ce que contiennent ces dossiers n’appartient qu’au patient. Libre à eux de les posséder, et d’en faire ce que bon leur semble !
— Cela a le mérite d’être clair.
— J’ai surtout peu de temps à accorder à ce type de considération. Il n’est ni question d’éthique ni de secret professionnel.
— Vous n’avez pas peur que le contenu de certains dossiers puisse choquer le patient ? demandai-je surprise par le peu d’humanité et de compassion que le personnage dégageait.
Son manque d’empathie me surprit tout autant qu’il me choqua. Comment pouvait-on soigner des personnes et ne pas prendre en considération le facteur émotionnel ? Il parlait à des êtres humains, pas à des poules !
— Ce n’est pas de mon ressort. Je n’ai pas de temps à perdre avec ce genre de considérations ! Si vous acceptez de prendre ce dossier, c’est que vous en acceptez d’en supporter le contenu et ses conséquences. Vous avez le choix. En aucun cas, je ne vous l’impose !
— Merci de ce que vous faites docteur, intervint Mark, désamorçant par la même occasion, l’irritation naissante de notre interlocuteur. Vous prenez de votre temps, et nous ne voudrions pas vous en faire perdre davantage. Le docteur Marcott vous porte en grande estime, et nous a suggéré que vous pourriez nous donner, si ce n’est des réponses, des explications quant à la perte de mémoire de Samuelle.
— Oui, c’est ce qu’il m’a expliqué. Seulement, à part vous remettre ce dossier, il me sera difficile de vous aider dans le cas de Mademoiselle Lookwood. Les faits se sont déroulés il y a bien trop longtemps pour que médicalement quelque chose soit possible et fasse régresser son amnésie.
— Ce n’est pas ce que l’on vous demande, marmonnai-je.
Mark me lança un regard réprobateur tout en m’attrapant la main pour la serrer légèrement, qui signifiait sous sa forme elliptique la plus élémentaire : taisez-vous !
J’eus droit au regard de reproche du docteur. Ce genre de regard qui s’interroge sur vous et se demande s’il mérite non seulement de se poser sur vous, mais surtout si vous êtes digne d’écouter ses paroles. Il se décidait enfin à ouvrir ce fichu dossier sans pour autant partager son contenu.
— De quel type de traumatisme souffrait Samuelle ?
— D’un traumatisme dit, modéré. La radio a montré un choc important. Même si personne ne peut en témoigner, je peux avancer vu la gravité du cas, qu’il y a eu perte de connaissance. Une perte de connaissance est toujours quelque chose de grave qui justifie l’appel du médecin en urgence.
— Ce degré de traumatisme peut-il entraîner des pertes de mémoire sur le long terme ?
— Oui, bien sûr. Associé au traumatisme psychologique dont nous venons de parler, il n’en faut guère plus.
Le docteur reprit en s’adressant directement à moi.
— Une perte de mémoire peut conduire à des comportements d’impatience, des déficiences physiques ou intellectuelles, et provoquer une dévalorisation de soi et une baisse de la motivation, etc. Cela explique en partie pourquoi l’intégration familiale, sociale, scolaire ou professionnelle peut causer certaines difficultés dans plusieurs cas de traumatismes craniocérébraux présentant une certaine gravité.
— Je n’ai ni déficiences physiques et encore moins intellectuelles !
— De visu, certes pas. Mais d’impatience et d’irritabilité oui ! C’est ce que vous m’avez affirmé il n’y a pas cinq minutes, il me semble !
Mark resserra sa main autour de la mienne.
— D’accord, j’ai eu quelques soucis étant enfant, mais qui me semblaient justifiés, non !? Je ne suis pas irascible tout de même !
— Si, vous l’êtes !
J’eus à ce moment un mouvement de recul et je tentai de dégager ma main qu’il resserra d’autant plus. Bêtement, je me sentis trahie par ses propos.
— Vous êtes sans arrêt sur vos gardes, prête à bondir, agressive. Avant-hier avec moi, hier avec le ranger, aujourd’hui avec le docteur. Et demain, avec qui ce sera ? questionna-t-il doucement. Il est temps que vous acceptiez que l’on vous aide. Et je ne parle pas de moi uniquement ! Toutes ces personnes que l’on voit acceptent de le faire pour vous soutenir. Je sais que vous avez peur, mais ne nous prenez pas pour vos ennemis. Nous allons tous dans le même sens et sommes de votre côté.
J’accrochai son regard calme et assuré. Je capitulai en comprenant qu’il était temps de le laisser s’approcher. Réellement m’approcher.
Étrangement, le docteur n’intervint pas. Bien au contraire, je fus l’objet de toute son attention. Observée, décryptée, analysée comme un rat de laboratoire. Je frissonnai devant son insistance et instinctivement me rapprochai de Mark.
— Je m’emporte certainement très vite ces derniers temps, mais je n’en suis jamais venue aux mains… enfin presque, terminai-je en lançant un regard de biais vers mon patron.
Je reçus un clin d’œil complice et me détendis.
— Voilà qui est positif. Le fait que vous l’acceptiez prouve que vous en avez conscience. Vous arrive-t-il de manquer de contrôle sur le plan sexuel, en passant rapidement à l’acte par exemple, sans réfléchir aux conséquences ? demanda-t-il abruptement, son regard alternant entre Mark et moi.
Je retirai vivement ma main de celle de Mark, n’osant même pas le regarder, les joues en feu.
— Samuelle et moi ne sommes pas en couple. Je suis uniquement là pour l’aider dans ses recherches.
— Soit ! Si vous le dites…
Son manque de conviction et son haussement de sourcil m’agacèrent profondément. Comment voulait-il que je reste calme en avalant des sous-entendus comme celui-ci !? Je pris sur moi pour trouver un équilibre entre mon loup noir et mon loup blanc.
— Qu’est ce que je peux faire pour retrouver la mémoire ?
— Connaissez-vous la cause de votre traumatisme crânien ?
— C’est ce que nous tentons d’éclaircir, répondit Mark.
— Excusez-moi, Docteur, mais quel est le rapport entre la cause de mon traumatisme et ce que je vis aujourd’hui ?
— Lorsqu’elle est parcellaire ou sensorielle, la mémoire traumatique est difficile à canaliser. C’est le cas lorsqu’elle ne peut être identifiée et reliée au traumatisme. Elle en est d’autant plus déstabilisante par son incompréhension, et déstructurant par ce sentiment récurrent d’être en danger, ce qui vous oblige à une attitude d’hyper vigilance avec pour conséquence une mise en place de différentes stratégies d’évitements en vue de vous protéger. À long terme, ce sont des situations épuisantes et handicapantes. Tous vos actes, toutes vos intentions sont programmés de façon à éviter un éventuel conflit, une situation. Votre vie se focalise sur le seul but de ne pas provoquer un déclencheur.
— Je ne pensais pas qu’il pouvait y avoir une cause à effet ? lançai-je surprise.
Et je compris par la même occasion pourquoi ma vie privée avait été un tel fiasco jusqu’à présent.
— En clair, vous demandez à Samuelle de retrouver la cause du traumatisme pour pouvoir gérer et dompter ses angoisses.
— hum, hum. Si vous voulez des résultats, je peux vous conseiller de replonger un maximum dans votre enfance. Retournez sur les lieux de votre accident, posez des questions à toutes les personnes qui ont touché ou effleuré votre parcours. Passez du temps avec vos proches, regarder de vieilles photographies, de vieux films, des cartes postales, des courriers si vous avez pu les conserver. Reprenez contact avec des personnes de votre village, d’anciens camarades de classe, qu’ils vous racontent des souvenirs du passé, retournez dans votre ancienne école. Même si tout cela concerne votre vie d’avant l’accident, cela fera travailler votre mémoire. Elle reprendra des chemins oubliés et cet exercice vous permettra peut-être d’arriver là où vous le souhaitez. Emmagasinez un maximum d’informations. En parcourant ces lieux, ces photos, les dires d’autrui, des bribes de votre mémoire réapparaîtront. C’est qu’une infime partie, et…
La sonnerie d’un mini réveil nous interrompit.
— Je vais devoir mettre fin à notre rendez-vous, j’en ai bien peur.
J’assimilai les conseils du docteur. Plus ils s’ancraient, plus mon abattement grimpait. Comment pourrais-je demander un quelconque souvenir à un de mes camarades puisque je n’étais pas scolarisée, mon père étant mon précepteur ? Que je n’avais jamais mis les pieds dans une école avant mes onze ans ! Que la seule personne qui me connaissait était Charlie, et qu’il m’avait déjà raconté tout ce qu’il pouvait me dire. Devinant mon désarroi, Mark passa doucement une main sur le haut mon dos. Je ne pus lui répondre qu’en lui adressant un triste sourire.
— Je tiens tout de même à vous mettre en garde, ajouta le docteur.
— On est plus à une mauvaise nouvelle près, lançai-je découragée.
— Dans une minorité de cas d’amnésie rétrograde, il arrive que le patient ne recouvre jamais la mémoire. Les souvenirs semblent être perdus définitivement. Je peux vous orienter vers un thérapeute qui s’intéresse à ce genre de question. Je connais un très bon psychologue cognitif spécialiste de la mémoire qui pourrait vous aider.
— Merci, répondit Mark à ma place tout en attrapant la carte que lui tendait le docteur.
J’étais incapable de réagir. On avançait d’un pas pour reculer de trois. C’était frustrant. Je sortis de ma léthargie lentement et remerciai à mon tour le neurologue d’avoir pris le temps de nous donner quelques réponses.
— Le dossier ! Vous deviez me donner une copie.
— C’est exact, répliqua-t-il tout en tendant le dossier à Mark.
J’approchai mon bras pour lui signifier qu’il se trompait de destinataire, mais il esquiva tout en ramenant le dossier à lui. Je le regardai, interloquée par sa réaction.
— Il serait préférable que je remette ce dossier à votre ami. Le contenu risque d’être difficile à supporter. Des photos ont été prises, et votre visage était particulièrement tuméfié.
— Je suis au courant. Le docteur Marcott me l’a déjà signifié.
— Samuelle, vous devriez prendre en considération les conseils du docteur, intervint Mark.
— C’est gentil de vous en soucier, mais il est temps de me considérer comme une adulte et non comme l’enfant qu’il y a dans ce dossier. Je suis capable de regarder une photographie en prenant le recul nécessaire. J’ai l’habitude, c’est mon métier. Eh puis, vous disiez bien tout à l’heure que chacun devait assumer ses choix, non ?
— Soit ! lança le docteur sur un ton pincé en me tentant enfin le dossier. Faites comme bon vous semble. Maintenant si vous voulez bien m’excuser, j’ai d’autres patients qui m’attendent.
J’ignorai sa remarque nous invitant à sortir et prendre congé, pour reposer le dossier sur le bureau et l’ouvrir. Les premières pages étaient un charabia incompréhensible et je tournai les pages frénétiquement sans savoir réellement ce que je cherchais.
Je restai bloquée, le souffle coupé par la vision qui s’offrit à mes yeux. Lentement, dans un geste d’horreur, je portai ma main vers mes lèvres, les recouvrant, comme pour empêcher tout son d’épouvante d’en sortir, mon regard fixé sur la photographie. Un polaroïd. Froid, pâle, racontant une histoire que je ne souhaitais pas entendre. Un visage d’enfant. Si cela n’avait pas été mon dossier, j’aurais été incapable de dire s’il s’agissait d’une fille ou d’un garçon. Derrière ce masque, c’était moi. Un artefact sinistre. Les chairs violacées, meurtries, l’œil droit totalement fermé tant il était gonflé. L’autre n’ayant pas meilleure mine. De violents cernes mauves tirant sur le noir les soulignaient. La lèvre inférieure éclatée comme la chair d’une cerise trop mûre. Pas une partie du visage n’avait été épargnée. Comme si j’avais été rouée de coups. La mâchoire inférieure abordant un angle douteux. Et puis, ce lambeau de chair sanguinolent, détaché de ce qui me restait de tempe droite, pendant le long de mon cou. L’origine de ma cicatrice. C’était moi, meurtrie dans ma chair, meurtrie dans mon âme. Un regard vide, sans expression, sans vie. Mort. J’étais morte. Ce jour où je suis revenue à la vie. C’est l’image que j’eus devant moi. Comment avais-je pu surmonter tout cela ? Comment avais-je pu dépasser ce traumatisme ? Pourquoi personne n’avait jamais cherché à comprendre ? On ne ressort pas d’une balade nocturne défigurée de la sorte. C’était impensable, impossible…
Je sortis de ma torpeur, lançant un regard d’incompréhension et d’hébétude vers Mark qui me retira vivement le dossier de sous les yeux et le referma précipitamment en étouffant un juron. C’était déjà trop tard, la photo était gravée. À jamais.
— Venez, sortons !
Le ton de sa voix, calme et rassurante, trancha avec l’expression de son visage, les traits déformés par la colère, le regard furieux.
— Je vous avais pourtant prévenu, Mademoiselle ! ajouta le docteur tandis que l’on passait la porte.
— Est-ce utile de le préciser ? rétorqua sèchement Mark, les yeux luisants de colère.
Pourtant je la savais dirigée vers celui qui m’avait fait subir ça et non vers le neurologue. J’étais convaincue que ses pensées s’étaient tout comme moi, dirigées vers Melinda. Qu’avait-elle pu subir ? Si je pensais avoir connu le pire, ce n’était peut-être qu’illusion. C’est guidé par Mark que je m’assis lourdement sur les fauteuils disposés dans le long couloir. Je passai mes doigts sur ma cicatrice, ce témoin muet d’une époque révolue, me demandant si un jour, elle m’ouvrirait les portes du passé.
La présence de Mark me rassura. Si la colère avait abandonné ses traits, c’est un visage inquiet qui se posa sur moi.
— Comment vous sentez-vous ? Voulez-vous que je vous apporte quelque chose à boire ?
— Je vais bien. Il me faut encore quelques secondes pour digérer ce que je viens de voir. Charlie y est allé un peu fort hier en me comparant à cette photo. Je sais que je n’avais pas bonne mine, mais pas à ce point.
— Au contraire. Charlie était dans le vrai.
— Comment ça !?
— Il ne parlait pas de votre visage… il parlait uniquement de votre regard. Je le sais, puisque je l’ai déjà vu. Un regard, sans vie, perdu. C’est de ce regard dont Charlie voulait parler. Un regard où je n’ai vu que des feux éteints.
Celui que je lui lançai fut, non sans vie, mais, désabusé.
— Vous avez repris connaissance, un bref instant dans les montagnes. Et c’est ce regard que vous m’avez lancé, continua-t-il doucement.
Un oh… douloureux, fut le seul son qui franchit mes lèvres. Je ne sus si ce fut à cause de la vision que je lui avais donnée ce soir-là, dans cet état de vulnérabilité ou de ce qu’il avait pensé à ce moment précis. Il m’aida à me lever doucement de mon fauteuil pour m’entraîner vers la sortie, sa nature protectrice reprenant ses droits.
Table des matières
- Prologue Env. 2 pages / 389 mots
- Chapitre 1 Env. 19 pages / 6383 mots
- Chapitre 2 Env. 13 pages / 4260 mots
- Chapitre 3 Env. 22 pages / 7208 mots
- Chapitre 4 Env. 19 pages / 6181 mots
- Chapitre 5 Env. 31 pages / 10348 mots
- Chapitre 6 Env. 17 pages / 5879 mots
- Chapitre 7 Env. 20 pages / 6723 mots
- Chapitre 8 Env. 26 pages / 8616 mots
- Chapitre 9 Env. 15 pages / 5159 mots
- Chapitre 10 Env. 15 pages / 4771 mots
- Chapitre 11 Env. 13 pages / 4259 mots
- Chapitre 12 Env. 21 pages / 7061 mots
- Chapitre 13 Env. 27 pages / 9015 mots
- Chapitre 14 Env. 14 pages / 4743 mots
- Chapitre 15 Env. 21 pages / 6913 mots
- Chapitre 16 Env. 16 pages / 5072 mots
- Chapitre 17 Env. 14 pages / 4600 mots
- Chapitre 18 Env. 16 pages / 5161 mots
- Chapitre 19 Env. 16 pages / 5224 mots
- Chapitre 20 Env. 21 pages / 7118 mots
- Chapitre 21 Env. 21 pages / 7094 mots
- Chapitre 22 Env. 18 pages / 6091 mots
- Chapitre 23 Env. 15 pages / 4981 mots
- Chapitre 24 Env. 21 pages / 6845 mots
- Chapitre 25 Env. 13 pages / 4247 mots
- Chapitre 26 Env. 14 pages / 4478 mots
- Chapitre 27 Env. 16 pages / 5253 mots
- Chapitre 28 Env. 19 pages / 6055 mots
- Chapitre 29 Env. 18 pages / 5869 mots
- Chapitre 30 Env. 16 pages / 5111 mots
- Chapitre 31 Env. 24 pages / 8116 mots
- Chapitre 32 Env. 18 pages / 6148 mots
- Chapitre 33 Env. 17 pages / 5492 mots
- Chapitre 34 Env. 24 pages / 8234 mots
- Chapitre 35 Env. 22 pages / 7498 mots
- Chapitre 36 Env. 16 pages / 5169 mots
- Chapitre 37 Env. 15 pages / 4977 mots
- Chapitre 38 Env. 17 pages / 5461 mots
- Chapitre 39 Env. 19 pages / 6272 mots
- Chapitre 40 Env. 18 pages / 6031 mots
- Chapitre 41 Env. 25 pages / 8315 mots
- Chapitre 42 Env. 19 pages / 6024 mots
- Chapitre 43 Env. 18 pages / 5857 mots
- Chapitre 44 Env. 19 pages / 6296 mots
- Chapitre 45 Env. 21 pages / 6836 mots
- Chapitre 46 Env. 23 pages / 7650 mots
- Chapitre 47 Env. 15 pages / 5058 mots
- Épilogue Env. 5 pages / 1462 mots
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