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Les vautours
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- Catégorie : Littérature humoristique
- Date de publication originale : 26/09/2007
- Date de publication sur Atramenta : 1 avril 2011 à 0h00
- Dernière modification : 6 avril 2011 à 20h59
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- Longueur : Environ 9 pages / 2 699 mots
- Lecteurs : 107 lectures + 83 téléchargements
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Chapitre premier
C’était en mars 1991, avant l’offensive terrestre des troupes de la coalition en Irak. Le monde était suspendu à CNN en 24/24. Je travaillais pour cette agence bancaire, comme jeune stagiaire. Je n’avais finalement pas été embauché.
A cette époque, je l’avais mal pris. Le secteur bancaire était plein d’avantages pour ses salariés, comme pour les dirigeants et les commerciaux, payés avec la misère des clients. Une banque prête de l’argent, mais en cas de non-remboursement de quelques mensualités, elle est autorisée à demander la totalité de la somme restant due au client. Mais avant, c’est déjà des frais bancaires élevés à régler en sus, et des procédures d’huissiers qui sont lancées pour l’affaiblir. Puis c’est souvent des saisies et des ventes aux enchères qui sont effectuées, ce qui ne permet pas au mauvais payeur de régler la totalité de sa dette, tout en l’ayant affaibli au maximum. Il n’a plus qu’a reprendre un crédit, aux mensualités moins élevées puisque la somme est plus petite, mais au taux bien supérieur. Pour un particulier, il pouvait y avoir une assurance, mais pour une entreprise, c’était la faillite qui parfois emportait avec elle la plupart des avoirs de son patron. Commerçants, paysans, artisans disparaissaient dans l’indifférence générale, tandis que la gauche caviar encaissait les dividendes à plus de dix pour cent annuels de la bourse de Paris.
Des entreprises de services, des chaines de supermarchés, des enseignes de magasins, et de grandes exploitations industrielles prenaient la place des indépendants et des petits. Certains smicards pouvaient voir leur vie gachée à cause de la conjonction d’un excés d’endettement pour la vie quotidienne, d’un besoin imprévu d’argent et d’un incident de paiement.
Finalement, avant que la commission de surendettement ne mette la banque face à un arrangement raisonnable, tous les avoirs du client s’étaient évaporés en frais exorbitants d’huissiers, d’avocats ou de banque à cause d’une petite somme manquante au départ.
Depuis, rien n’avait changé. La seule façon d’être tranquille était d’être Rmiste en logement social. Enfin, d’autres vautours les guettaient : les télés payantes, les buralistes, les cafetiers, les opérateurs téléphoniques, les boulangers, les mecanos, les vendeurs de supermarché pour récupérer les quelques francs qui leur permettaient de survivre.
Au cours de ces vingt cinq dernières années, la situation s’était accélérée. Le pouvoir d’achat des ménages baissait chaque année en Europe et aux Etats-Unis tandis que les états démocratiques en faillite étaient noyautés par le grand capitalisme qui faisait élire les dirigeants de paille qui leur voteraient des lois encore plus favorables. Il avait pris le contrôle des médias, y compris celui d’internet. En France, l’état providence en faillite avait fini par vendre ses entreprises pour ne faire que rembourser les intérêts d’une dette que les dirigeants malgré les apparences s’étaient évertués à aggraver pour assurer des revenus réguliers et de « bonnes affaires » aux financiers. Les autoroutes, le secteur énergétique, la poste, la distribution d’eau, le traitement des déchets, mais aussi d’anciens services publics comme les hôpitaux , la justice et la police étaient tombés entre leurs mains.
Pourtant, cette embellie capitaliste ne profitait plus aux banques, d’où ma venue aujourd’hui dans cette agence. Je venais récupérer les disques durs tampons de leurs serveurs qui transmettaient les données concernant leurs clients vers les centres informatiques des sièges sociaux.
Il y avait eu des signes avant-coureur : La mauvaise passe du Crédit Lyonnais, renfloué par l’état, la faillite de la Barings… en Angleterre …puis des faillites de grandes sociétés comme Enron. Les compagnies d’assurances se serrèrent les coudes, les américains continuèrent leur fuite en avant, le monde se focalisa sur l’après 11 septembre, oubliant le « bug de l’An 2000 » et la réussite insolente de quelques grosses sociétés aux dépens de toutes les autres, comme à ceux de toutes les populations, passait inaperçue du grand public. Dans le même temps, au niveau législatif comme sur Internet, sous couvert de sécurité, de défense du « code de la propriété intellectuelle » et d’une certaine moralisation, la chape de plomb chaque jour finit d’étouffer la concurrence comme la contestation. Puis l’argent réduit à une carte bleue et à des unités de comptes, et les conseillers financiers remplacés par des systèmes experts de simulation, les agences bancaires n’avaient plus aucun intérêt. Et tout le monde y avait droit, surtout que la dénatalité compensée par l’allongement du temps de travail d’employés de plus en vieux (mais payés une misère suite à la « reconduite négociée annuelle du contrat de travail », devenue la norme grâce à la disparition des syndicats et aux nouveaux textes de lois régissant le monde du travail) permettait un emploi pour tous. Un emploi mal payé pour beaucoup, sauf pour les informaticiens qui avaient permis la mise en place de la nouvelle société équitable et respectueuse de l’environnement.
Aujourd’hui, un chinois n’envie plus son homologue français et les usines ne sont donc plus délocalisées, il n’y a plus d’immigrés qui quittent leurs pays pour raisons économiques, même en Afrique.
Mais pour le directeur de l’agence, aujourd’hui en instance de recherche d’emploi, c’était fini les safaris. Il lui resterait la chasse au dahut en Corrèze. Je poussai la porte vitrée. Il était assis face à la machine à café, en bras de chemise, un gobelet à la main. Manifestement, il n’en avait plus rien à faire. Il avait vieilli et ne se remettrait jamais. Et pourtant, selon la norme, il lui restait encore quelques années de cotisation à la Caisse de Retraite Unifiée à assumer avant d’en bénéficier pour lui-même. Il leva les yeux vers moi et me reconnut immédiatement.
« Auguste ! Auguste Picrate. Si je m’attendais… »
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