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La barbe du père Noël
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- Catégorie : Jeunesse
- Date de publication sur Atramenta : 1 décembre 2020 à 10h59
- Dernière modification : 6 décembre 2020 à 10h39
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- Longueur : Environ 8 pages / 2 384 mots
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La barbe du père Noël
La barbe du père Noël
Florian regarde son père : il vient de s’asseoir dans son fauteuil, avec une lenteur calculée pour ne pas réveiller ses vieilles douleurs. Pensif, il caresse sa longue barbe blanche, beaucoup moins bouclée que les fausses barbes de ses collaborateurs lorsqu’ils le représentent. Cependant, elle est soyeuse et la lumière y met de doux reflets.
La barbe de Florian n’est pas aussi grande et surtout elle n’a pas la même couleur, c’est ce qui provoque des discussions avec son père :
— Nous devons parler sérieusement, papa. Tu dois te reposer et surtout en cette année particulière où un virus change la vie de tout le monde, tu dois te protéger.
— Mais enfin, Florian, il est hors de question de priver les enfants de la fête de Noël ! C’est impensable !
— Je suis d’accord avec toi, mais tu dois envisager de « passer la main », de confier au moins une partie de ton travail à tes collaborateurs…
— Je le fais déjà !
— Mais il faut le faire encore plus ! Et tu dois me faire confiance, que j’apprenne ton travail afin de pouvoir prendre ta succession quand… quand tu auras envie de te reposer !
— Ta barbe n’est pas blanche ! Quand elle le sera, tu seras prêt à me remplacer !
— Je ne veux pas te remplacer tout de suite, papa, mais si tu veux poursuivre ta mission encore un certain temps, il faut que tu restes le plus possible chez toi ! Reconnais que cela fait déjà longtemps que tu délègues la livraison des cadeaux, surtout que la plupart des maisons et des appartements n’ont plus de cheminées. Pour les commandes des enfants, ton bureau de Poste reçoit les lettres, les trie, y répond pour toi selon tes instructions et tu n’as qu’à les signer !
— Justement, tu vois, je n’ai plus grand-chose à faire !
— Il te reste toutes les visites dans les galeries marchandes où les enfants viennent chuchoter leurs désirs dans tes oreilles. Or, en ce moment, ce n’est pas raisonnable d’aller dans des lieux où tu pourrais attraper le virus. D’ailleurs, il y a plusieurs magasins qui sont fermés.
— Donc, il y a moins de risques…
Florian soupire : son père est terriblement têtu. Il lui reste un dernier argument et il est important.
— Avec tes Lutins, nous avons imaginé une manière de remplacer ces visites : utiliser la technologie pour que les enfants te parlent en visioconférence ! Le Lutinformaticien a déjà imaginé le logiciel, le Lutinventeur a créé le studio depuis lequel tu pourrais parler aux enfants du monde entier, et crois-moi, tu vas avoir de l’affluence derrière ton écran !
— Tu crois ?
— Bien sûr ! Les enfants, depuis leur plus jeune âge, actuellement, sont accros aux écrans, pour les jeux, les vidéos, le téléphone… Ils vivent avec ceux de leurs parents, ils ont les leurs : tu livres de plus en plus d’ordinateurs pour les petits, rappelle-toi ! De plus, avec les confinements et autres mesures imposées aux gens, le télé-travail s’est amplifié, voire généralisé. Les enfants voient leurs parents sans cesse devant leur poste de travail informatique. Ils seront ravis que tu t’adresses à eux directement !
— Oui… peut-être ! Mais les endroits où il n’y a pas de connexion… Ce ne serait pas juste que ces enfants qui habitent là soient privés de ma visite…
— Je suis bien d’accord avec toi. Et là, c’est moi qui vais y aller !
— Mais le risque est aussi pour toi…
— Pas si nous utilisons la proposition que tu viens de recevoir : c’est une galerie qui imagine une simulation de visioconférence, avec une cabine, un écran en plexiglas et les enfants viendront s’installer devant pour discuter avec toi (enfin, moi plutôt) pour exprimer leurs désirs !
— Ah, c’est une super idée ! Donc, je peux y aller moi-même !…
— Encore une fois, papa, il serait bon que tu ne te fatigues pas trop. Et je peux t’assurer qu’avec le télé-travail tel que le Lutinformaticien l’a programmé, tu seras malgré tout obligé d’appeler des collaborateurs, sinon tu devrais travailler vingt-quatre heures sur vingt-quatre !
— Et pour les photos ? Les parents aiment bien avoir la photo de leurs enfants sur mes genoux…
— Là encore, la technologie d’aujourd’hui a permis un “progrès” qui sera apprécié de tous : la visioconférence sera enregistrée et les parents pourront la recevoir sur leurs ordinateurs…
Le père de Florian hoche de la tête. Après un temps de silence, il reprend :
— Mais n’est-il pas recommandé de continuer à faire de l’exercice, de ne pas rester tout le temps derrière son ordinateur ?
— Tu dois t’occuper de l’atelier des Lutins pour la préparation des paquets cadeau, de ta Poste pour signer les courriers et n’oublie pas tes rennes ! Il faut les soigner chaque jour, tu sais bien qu’ils t’attendent ! Pour la nuit de Noël, tu devras parcourir la Voie Lactée, toutes les constellations partout autour de la Terre pour enchanter les rêves des enfants sages et endormis !
— D’accord, je vois que vous avez réponse à tout ! Mais ta barbe ? Elle ne va pas devenir blanche… et même avec un postiche, elle risque de se voir…
— Je veillerai à ce que ses élastiques soient bien tendus ! Comme pour les masques anti-virus !
Finalement, Florian a réussi à convaincre son père. Le Lutinformaticien et le Lutinventeur ont présenté au père Noël leur projet : un studio confortable, parfaitement décoré pour Noël, où le père Noël recevra les confidences des enfants et où il pourra leur répondre en visioconférence.
— Au moins, vous éviterez les pipis sur les genoux ! a remarqué, avec un humour un peu familier, le Lutinventeur.
— Et les bisous poisseux de bonbons, a complété le Luntinformaticien.
— D’accord, d’accord, a grommelé le père Noël. Montrez-moi plutôt comment me servir de cet engin ! Apprendre l’informatique à mon âge… Pour mon fils, je suis trop vieux pour me déplacer, mais pour pianoter sur cette machine, je suis encore bon !
— Allons, papa, intervient Florian, cesse de râler. Je suis sûr au fond que tu es ravi de ces changements !
Le père Noël a secoué la tête, gardé ses sourcils froncés, mais l’éclat de ses yeux démentait son attitude. De fait, en quelques heures, il maîtrisait la pratique de la visioconférence et a commencé à s’amuser avec les enfants qui venaient lui parler !
Bien sûr, cela ne l’empêche pas d’aller brosser et nourrir ses rennes, d’astiquer et cirer son traîneau pour qu’il soit impeccable à la première sortie dans le ciel, de faire des balades dans les bois avec eux, mais il apprécie son nouveau travail.
Florian, lui, a trouvé une barbe blanche qui lui convient : bien ajustée, elle cache sa vraie barbe, noire et luisante. Il se rend dans la galerie où le studio de simili-visioconférence l’attend. Il ressemble à celui créé pour son père par le Lutinventeur, à part que l’ordinateur mis à sa disposition, s’il ne dispose pas de connexion, permet cependant l’enregistrement de la discussion, vidéo qui est proposée aux parents sur clé USB.
La nouveauté du dispositif attire beaucoup de public, malgré les mesures de distanciation et de confinement imposées à cause de l’épidémie. Florian apprend son futur métier et il s’y consacre avec enthousiasme et plaisir.
Un soir, alors que la file des enfants se termine, se présente une petite fille, tenant un garçonnet par la main. Elle le guide jusqu’à la chaise de bureau à roulettes, placée devant l’écran de plexiglas et le clavier mis à la disposition des enfants. Bien sûr, ils peuvent pianoter tout ce qu’ils veulent dessus, puisque les lettres ont été remplacées par des petits symboles ou des images. La fillette, son frère une fois installé, se recule pour le laisser parler au père Noël de l’autre côté de la vitre.
Comme tous les autres, le petit récite sa liste de cadeaux et finit par la formule de remerciement imaginée sans doute par sa maman. Florian le salue, discute un peu avec lui, puis lui dit qu’il a bien enregistré sa demande. Il lui sourit à travers sa fausse barbe et le petit semble ravi.
La grande sœur vient alors retrouver son frère et l’aide à descendre de la chaise. Puis, au lieu de repartir avec lui, elle l’envoie vers leurs parents qui attendent un peu plus loin. Elle reste debout devant l’écran de plexiglas, intimidée, mais avec manifestement le désir de parler.
Florian l’invite :
— Bonsoir, comment t’appelles-tu ?
— Zoé ! Et heu…
— Que voudrais-tu pour Noël ?
— Une voiture…
Florian est étonné : d’habitude, les enfants expriment d’autres souhaits, citant des jeux célèbres, des marques réputées, des jouets à la mode, vantés par les publicités à la télévision.
— Une voiture ? Une voiture comment ? Télécommandée ? À pédales ?
— Électrique ! Mais une vraie voiture !
— Tu es un peu jeune pour conduire, d’ailleurs, tu n’as pas le permis encore. Et puis, une voiture, c’est un peu gros pour mettre sous le sapin et pour passer par les cheminées…
— Pfff ! Je sais bien ! Mais c’est pas pour moi, c’est pour ma grand-mère ! Elle n’a plus de voiture et ne peut plus sortir de chez elle. Alors, je me demandais…
— Elle doit être extraordinaire, ta grand-mère, pour que tu demandes un cadeau pour elle au père Noël ! Tu l’aimes beaucoup, n’est-ce pas ?
— Oh, oui ! Je… je voudrais qu’elle puisse continuer à venir nous voir, aller me promener avec elle et je sais qu’elle rêve d’une voiture électrique. S’il te plaît…
— Je voudrais bien, mais… je ne crois pas que ce soit dans mes possibilités. Je le regrette bien… Tiens, il me vient une idée !
Florian se penche sur le côté et désigne le bout de la galerie marchande :
— Tu vois, là-bas, la voiture ?
Zoé se retourne et répond :
— Oui ! Ben, c’est une voiture comme ça, que je voudrais pour ma grand-mère !
Les yeux éblouis de la petite brillent autant que le bleu étincelant de la carrosserie du véhicule, sous les spots du plafond. Florian prend une décision :
— Ce matin, dans la galerie marchande, il était distribué des tracts pour un concours publicitaire. Le gros lot est cette voiture… électrique justement.
Une fente a été ménagée sous l’écran de plexiglas afin que les enfants qui ont écrit une lettre ou réalisé un dessin pour le père Noël puissent les offrir à leur destinataire. Florian, à son tour, glisse le document :
— Il y a des questions. Avec ta grand-mère, vous pourriez y répondre et si vous avez toutes les bonnes réponses, le bulletin pourra participer au tirage au sort. Il faut donner la réponse par internet, sur le site du marchand de voitures et ajouter le numéro du bulletin. Tu devras demander à tes parents de vous aider si vous ne savez pas comment faire…
— Oh, mais ma grand-mère, elle sait ! C’est elle qui m’a appris à jouer au Solitaire sur son ordinateur ! Et puis on s’envoie des messages, des photos, on rigole en faisant des grimaces devant la webcam !
— Super !
— Et puis, ma grand-mère, sur son ordinateur, elle m’écrit des histoires à lire avant d’aller me coucher !
— Bravo ! Je comprends pourquoi tu aimes tant ta grand-mère !
Florian pense à son père qui vient seulement de découvrir les visioconférences : il lui parlera de cette grand-mère à la pointe du progrès ! Puis il ajoute :
— Bien sûr, vous n’êtes pas assurées de gagner la voiture, mais tous les bulletins seront récompensés par un cadeau.
Zoé grimace : elle est assez grande pour savoir qu’il faudrait beaucoup de chance pour remporter le gros lot.
— Merci. Mais je ne voudrais pas qu’elle soit déçue…
Florian porte la main à sa barbe et ne se rend pas compte qu’il la déplace légèrement. Il réfléchit très vite. Pour que le bulletin soit gagnant, ne pourrait-il user de son influence ? Ou plutôt de celle de son père ? Mais ce serait tricher… Pourtant, ce matin, quand Madame Chance lui a remis le papier, elle a insisté :
— Je vous le confie, Florian, faites-en bon usage ! Donnez-le à quelqu’un de très méritant…
Sur le moment, il n’y a pas pris garde, mais cette réflexion ne veut-elle pas dire que le numéro sera celui qui sortira le premier au tirage au sort ? Et qui peut être plus méritant qu’une fillette demandant un cadeau pour sa grand-mère ?
Bien sûr, il ne peut rien dire à cette petite Zoé, mais il lui vient à l’idée d’aller trouver sa complice de fête, la Fée Électricité, qui illumine les sapins, les maisons, les jardins pour Noël. Avec elle, il ira trouver Madame Chance, cette dame ronde comme une boule de loto ou de billard, qui lance ses balles de plaisir en feux d’artifices et qui pétille de joie comme les bulles de savon ou de champagne que l’on ouvre pour la célébrer. Il sait qu’elle aime beaucoup rire et apprécie les chatouilles. Alors avec Fée, ils vont la mettre de bonne humeur, afin qu’elle réalise le vœu de Zoé pour sa grand-mère.
Il reprend :
— Je vais penser très fort à toi et à ta grand-mère et j’espère que vous gagnerez ! Quel que soit le résultat, même le plus petit lot fera plaisir à ta grand-mère. Et sais-tu pourquoi ? Parce que c’est l’intention qui compte. Parce qu’il sera la preuve que tu as pensé à elle, que tu as rêvé de lui offrir la voiture dont elle a envie. Et je sais déjà qu’elle t’en aimera encore plus ! Tu me crois ?
La fillette retrouve le sourire :
— Oui, je te crois, même si tu n’es pas le vrai père Noël !
Un peu troublé, Florian affirme :
— Je suis le fils du père Noël ! Un jour, je prendrai sa suite. Mais pourquoi dis-tu que je ne suis pas le vrai père Noël ?
— Parce que sous ta barbe blanche, je vois ta vraie barbe et qu’elle est noire !
Florian rit :
— Quand elle sera devenue blanche, je serai à mon tour le vrai père Noël ! Mais chut ! C’est un secret entre nous. D’accord ? Tu ne diras rien ?
— Promis ! Merci, père Noël !
— Joyeux Noël, Zoé !
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