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Annonces à propos de : Les émeutiers du Grand Quay
05/09/2020 08h01
Merci à tous
A propos de : Les émeutiers du Grand Quay
Trois mois après la mise en ligne de mon roman historique « Les émeutiers du Grand Quay » qui met en scène les émeutes de subsistance qui ébranlèrent Le Havre en 1789, vous êtes plus de 100 lectrices et lecteurs à m’avoir accordé votre confiance et à m’avoir fait l’honneur de le lire en ligne ou de le télécharger. J’en suis bien entendu particulièrement heureux et je tenais par le biais de ce petit message à remercier très sincèrement celles et ceux qui se sont laissé tenter par cette aventure littéraire.
Je ne saurais trop les encourager à partager sur le site leur avis sur ce texte. Commentaires, remarques, critiques, seront toujours les bienvenus et je m’engage à répondre à chacun d’entre eux ;
Merci encore à tous ces lecteurs passés, présents et à venir.
Bien cordialement à toutes et à tous,
Gérard Hatton.
21/06/2020 08h29
Les officiers municipaux du Havre en 1789
A propos de : Les émeutiers du Grand Quay
S’il fut relativement aisé de restituer la physionomie de la ville en 1789, tant les documents et l’iconographie sont abondants et nous fournissent moult indications et points de repère, mettre des noms (et je ne parle même pas des visages) sur les hommes qui étaient aux commandes des destinées de la cité au moment où éclatèrent les événements révolutionnaires de 1789 s’est révélé extrêmement plus ardu, plus délicat, plus hasardeux même, notamment en ce qui concerne les échevins qui constituaient à l’époque des rouages essentiels du régime municipal.
Faut dire que le « turn-over » des officiers municipaux, imposé par les règles qui régissaient ces institutions, n’est guère fait pour nous simplifier la tâche. Très vite, on se perd dans les méandres du long fleuve sinueux de l’Histoire, les sources se tarissent, les pistes se perdent en chemin, les indices se font rares, imprécis, confus, la lumière devient obscurité. Et même si quelques noms apparaissent ici ou là (les plus célèbres d’entre eux, bien sûr, ceux qui ont marqué de leur empreinte l’Histoire de la ville), les positionner avec précision sur l’échelle chronologique relève de la gageure, une véritable mission impossible pour le profane que je suis, et l’on est vite contraint de s’en remettre aux conjectures, aux supputations et autres probabilités.
Dans le but de tenter de démêler cette intrigue historique, j’entrepris de longues recherches, difficiles, laborieuses, d’autant plus délicates en cette longue période où les portes des Archives Municipales sont restées closes. Des recherches, donc, qui me permirent toutefois d’aboutir à un résultat dont je me garderais bien d’affirmer qu’il est exempt de toute erreur. Tout au contraire, je vous le livre avec toutes les réserves d’usage et j’espère que vous ne m’en tiendrez pas trop rigueur si vous y décelez, ici ou là, quelque anomalie…
Voici venu maintenant le moment de vous dévoiler le fruit de mes recherches :
Selon ces dernières, et, vous l’aurez compris, sous toutes réserves, les quatre échevins en exercice en l’an 1789, s’appelaient : Pierre Duval, premier échevin ; il sera le premier Maire du Havre, élu le 14 février 1790, démissionnaire le 15 novembre de la même année, vraisemblablement en raison d’un désaccord d’ordre religieux. À cette époque, Liberté, Égalité, Fraternité ne rimait pas (encore ?) avec Laïcité. Les autres échevins se nommaient : Delahaye aîné (Jean-Baptiste-Joseph ?), négociant ; Jean-Charles-Marie Costé, avocat, notaire de son état, et Denis-François Eustache, négociant lui aussi.
Le gouverneur de la ville était Paul François de Beauvilliers, comte de Buzançais, petit-fils du duc de Saint-Aignan. Il occupera cette fonction du 23 janvier 1776 au 13 février 1790, même si son intérêt pour Le Havre fut très relatif et qu’il n’y mit que très rarement les pieds. Il avait choisi pour le représenter dans la place Louis-Henri Cillart, lieutenant du Roi, comte de Villeneuve, brigadier des Armées du Roi.
Le lieutenant du bailliage était Marie Glier, le procureur-syndic Jean-Louis Oursel, l’huissier un certain Corbel. Le greffier s’appelait Amelin et je ne suis hélas pas parvenir à retrouver le nom du receveur. Deux préposés à la police du Havre, répondant au nom de Ourel François et de Morru ont signé l’avis informant les Havrais de la tenue des élections de leurs représentants à l’assemblée du Tiers État de la ville.
Une autre instance occupait une place et jouait un rôle important au Havre à cette époque. C’était le Comité des négociants, l’ancêtre de notre Chambre de Commerce. En 1789, on y trouve les noms de Louis Papillon, Jacques-François Begouen, Stanislas Foache, Lestorey de Boulongne (Benjamin ?), Jean-Laurent Ruellan, Jean-Marc Belot, Jacques-Pierre-Antoine Blanche, Fauconnier fils, Stanislas Foache et… un certain Pierre Duval.
Même si leurs noms n’apparaissent cette année-là dans ces instances où se prenaient les grandes décisions de la vie havraise, il paraît bien improbable que des notables tels que Jean-Baptiste Féray et Martin-Pierre Foache, le frère de Pierre-Stanislas, n’aient eu quelque rôle important à jouer sur ce grand échiquier économique et politique qu’était Le Havre à cette époque-là. Ils étaient, faut-il le rappeler, les plus grosses fortunes de la place et les hommes les plus influents de la cité en cette fin de XVIIIe siècle…
S’il fallait une preuve, une seule, que fortune et politique s’imbriquaient étroitement à cette époque et que la ville était « aux mains » des négociants, on la retrouverait incontestablement dans la liste des députés qui furent élus pour représenter les Havrais à l’assemblée générale préparatoire aux États Généraux de Caudebec-en-Caux de 1789 : Pierre Duval, échevin. – Faure, avocat. – Costé, échevin. – Begouen, écuyer, négociant. – Louis Legrand, négociant. – Stanislas Foache, écuyer, négociant. – Delahaye le jeune, négociant. – Lestorey de Boulongne, négociant. – Louis Papillon, négociant.– Blanche, père, négociant. – Ruellan, négociant. – Fauconnier fils, négociant. – Laignel, avocat – Fabvre, sous-lieutenant de vaisseau, capitaine de bâtiments du commerce. – Michel, procureur du roi de l’amirauté – Maraine, bourgeois. – Gentais, greffier des assurances. – Bunel, lieutenant criminel de l’amirauté. – Lihaut, marchand – Lescan, chevalier de Saint-Louis, ancien capitaine de frégate. – Bréham, interprète des langues étrangères.
18/06/2020 09h41
Conseil de ville et assemblée générale
A propos de : Les émeutiers du Grand Quay
Jean Legoy, dans son ouvrage « Le peuple du Havre et son Histoire, tome 1 », nous a livré les explications les plus simples, et par conséquent les plus claires, du fonctionnement de ces instances municipales. C’est la raison pour laquelle je vous les restitue in extenso :
« Dès l’origine Du Chillou, qui a la haute main sur tout ce qui concerne le port et la ville, administre la cité avec l’aide de quelques officiers de son entourage. Quand la ville commence à être habitée, deux notables bourgeois élus et un procureur-syndic lui sont adjoints pour l’aider dans sa tâche. Jusqu’à son départ en 1528, Du Chillou concentre en ses mains tous les pouvoirs : c’est le premier gouverneur du Havre. Le nombre des élus est porté à quatre vers 1540, et ils reçoivent le nom d’échevin sous le gouvernement de Sarlabos (1563-1584).
Ce n’est qu’en 1587 que la ville reçoit sa constitution définitive qui règle son administration jusqu’en 1789. Les « ordonnances et règlements faits par Monsieur de Villars, Gouverneur pour Le Roy » décide que la ville sera administrée par quatre échevins dont le plus ancien est remplacé chaque année par élection, à la fête des Saints-Innocents. Le premier échevin préside l’assemblée en l’absence du gouverneur ou de son lieutenant. Huit conseillers et douze notables choisis parmi les plus riches habitants, s’associent aux échevins lors des assemblées générales. Ils élisent un procureur-syndic chargé de défendre les franchises, privilèges et intérêts de la ville et aussi d’étudier et de proposer les mesures intéressant la communauté. Ils élisent également le receveur des deniers communs qui est responsable des finances de la commune ; le greffier qui remplit les fonctions de secrétaire et tient les registres ; le ménager chargé de surveiller les travaux ordonnés par la communauté ; et enfin ils nomment deux clercs-sergents qui font fonction d’huissiers. Le gouverneur, les quatre échevins, le procureur-syndic, le greffier, le ménager et les deux clercs-sergents composent le « corps de ville », qui siège depuis 1551 dans le « Logis du Roy », premier hôtel de ville du Havre, situé près du quai, à l’emplacement de l’actuel boulevard John Kennedy ».
« Le régime municipal du Havre était une bourgeoisie très jalouse de sa condition et assez dédaigneuse du pauvre peuple, écrivait Flour de Saint-Genis dans « L’esprit public et les élections au Havre de 1787 à 1790 » (Recueil des publications de la Société havraise d’études diverses, 1889), mais c’était une bourgeoisie ouverte, qui se recrutait volontiers parmi les petits marchands enrichis, les matelots devenus armateurs, et même les étrangers auxquels d’heureuses spéculations avaient donné droit de cité ». Et il ajoutait : « Cette situation particulière se caractérisait par l’échevinage, l’égalité de droits des échevins, et le privilège de l’élection conféré à un groupe très restreint. Les Havrais protestaient aussitôt qu’on touchait à ces habitudes ».
C’est précisément ce qui se passa lorsque des édits réorganisèrent, en 1764 et 1765, l’administration municipale dans toutes les provinces, et la rattachaient au pouvoir central en réservant au roi la nomination du maire. À la requête des échevins, lesquels se réclamèrent des privilèges jadis accordés à la ville de Grâce par les différents souverains au cours de l’Histoire de la cité portuaire, une exception fut faite pour Le Havre. Nos édiles revendiquèrent et, chose extraordinaire, ils obtinrent que soit maintenu pour Le Havre le régime de l’échevinage. « Ses quatre échevins, son procureur syndic, son greffier et son receveur continuent à former le Conseil ordinaire qui, joint aux anciens échevins, aux quarteniers et aux huit bourgeois notables constitue le Conseil général, lit-on dans une communication de Suzanne Deck intitulée « Les municipalités en Haute-Normandie » parue en 1962 dans les « Annales de Normandie », (12ᵉ année, n°3, 1962. pp. 151-167). Le lieutenant du Bailliage évincé conserve simplement droit de séance sans voix délibérative ; le Gouverneur reprend la présidence, remplacé en cas d’absence par le premier échevin : celui-ci seul prête serment aux mains de l’Intendant et c’est lui qui reçoit le serment de ses confrères. Jusqu’à la Révolution, les bourgeois préserveront les organes urbains du XVIe siècle »
Pour résumer, le bureau ou conseil permanent de la commune était donc composé de quatre échevins, chacun d’entre eux étant élu pour quatre ans ; Le premier échevin en exercice sortait du conseil et un nouvel échevin, élu par l’assemblée générale qui se réunissait chaque année le 28 décembre, faisait son entrée au conseil ; Le plus ancien (en poste) des échevins prenait alors la fonction de premier échevin qu’il conservait durant une année avant de se joindre au corps des anciens échevins.
Toutefois, il semble que cette règle ait parfois connu des exceptions et qu’un même échevin ait accompli plus que son mandat légalement prévu. Il en va ainsi, par exemple, pour Michel-Joseph Dubocage, élu à trois reprises maire-échevin du Havre de 1736 à 1747 et membre du Conseil de ville jusqu’en 1751. Était-ce en raison de compétences exceptionnelles et indispensables ? À cause d’une absence de candidats ? Ou en raison d’une confusion ? En effet, à cette époque, les pères, les fils, les oncles, les neveux, les cousins, portaient souvent, à quelques variantes près, les mêmes prénoms…
Ces assemblées générales se réunissaient sous la présidence d’honneur du Gouverneur ou, en cas d’absence de ce dernier (ce qui était le plus souvent le cas), du Lieutenant de Roi. Elles étaient composées des quatre échevins, du procureur-syndic, du receveur, du greffier, de tous les anciens échevins, des douze officiers de quartier, de huit notables bourgeois dont six représentant la paroisse de Notre-Dame et deux celle de Saint-François.
Au surplus, quelles qu’aient été les conditions d’élection des membres dont le mandat était expiré, elles furent modifiées sensiblement en 1770. Le Comité, d’après une délibération du 5 mai de cette année, devait être composé à l’avenir de quatre membres élus pour trois ans et de deux autres nommés pour deux ans (1). La première élection du nouveau régime eût lieu le 10 du même mois. Il ne paraît pas qu’il y ait eu de suppléants. Cependant, quand des membres se trouvaient, en raison de leurs fonctions, dans l’impossibilité d’assister aux réunions, on procédait alors à une élection complémentaire. C’est ainsi que Begouen, député à la Constituante, et Pierre Duval, élu maire du Havre, furent remplacés au commencement de 1790 par Louis Papillon et Boulongne l’aîné.
1) Arch. de la Chambre de commerce, carton 10, feuille d'élection pour 1787.</><>
14/06/2020 09h10
Retour sur Atramenta
A propos de : Les émeutiers du Grand Quay
Bonjour à toutes et à tous !
Né en 1947, retraité, je m’appelle Gérard Hatton, et je suis passionné de lecture, d’écriture, d’Histoire en général, d’Histoire de la Normandie et du Havre, ma ville de naissance et du cœur, en particulier.
J’ai découvert Atramenta par hasard il y a de cela quelques années, je lui avais confié à l’époque quelques-uns de mes écrits, puis je les avais retirés, pour des raisons personnelles. Je tiens à préciser de suite que les qualités qui sont celles de ce site (et des personnes qui l’animent) que je trouve particulièrement bien fait, d’un accès facile, agréable et sympathique ne sont nullement en cause dans cette décision de « retrait ».
Comme beaucoup d’entre nous, sans doute, j’ai commis mes premières petites histoires sur les bancs de l’école primaire. Elles faisaient régulièrement le tour des copains, de main en main, et, depuis, je n’ai quasiment jamais cessé d’écrire. Mes héros d’alors étaient de preux chevaliers au grand cœur, des shériffs aux colts vengeurs et des aventuriers de l’espace partis à la découverte de galaxies lointaines. J’ose espérer que, fort heureusement, avec le temps et de longues heures de lecture, mon Français, mes connaissances, mon approche du monde et mon style se sont bien améliorés, et que ce j’écris aujourd’hui a de bien meilleures qualités que mes productions de cette époque.
Il m’est revenu tout récemment l’envie de partager à nouveau quelques-unes de ces histoires que j’estimais être les meilleures de celles que j’avais commises ces dernières années. Et c’est tout naturellement que je me suis connecté sur le site Atramenta lorsque, au terme d’une longue et profonde réflexion, je me suis finalement décidé à franchir le pas.
Alors, je vous invite à découvrir « Les émeutiers du Grand Quay », une aventure humaine qui a pour cadre la ville et le port du Havre à l’époque des événements révolutionnaires de 1789. J’espère que vous lui réserverez le meilleur accueil et qu’il en sera de même pour mes autres publications à venir. N’hésitez pas à me faire part de vos remarques, vos avis, vos critiques. Elles seront toujours les bienvenues. Je vous invite également à faire connaître ce roman autour de vous, s’il vous a plu et si vous le désirez, bien évidemment.
Merci à toutes et à tous pour l’attention et l’intérêt que vous avez eu la gentillesse de m’accorder.
Bonne lecture !
09/06/2020 08h32
Le Havre en 1789
A propos de : Les émeutiers du Grand Quay
Le roman « Les émeutiers du Grand Quay » (en téléchargement et en lecture, libres et gratuits, sur le site Atramenta) nous plonge dans Le Havre de 1789, à l’heure où la cité résonne des heurts et des cris des événements révolutionnaires. Mais ce Havre de 1789, quel visage avait-il ? Il ne ressemblait pas vraiment, vous vous en doutez bien, à celui que nous connaissons aujourd’hui…
En 1789, Le Havre, qui ne compte encore que ses deux quartiers originels, Notre-Dame et Saint-François, étouffe, plus que jamais, entre ces remparts édifiés, pour certains, dès les premières heures d’existence du port et de la ville.
C’est une brèche ouverte dans ces remparts dont on avait entrepris, pour partie, la démolition pour faciliter le creusement du nouveau bassin d’Ingouville, que s’engouffrèrent en juillet 1789 les émeutiers venus des communes voisines, d’Ingouville notamment, pour y semer les troubles qui aboutirent aux événements que l’on sait.
La porte d’Ingouville, dite « porte Richelieu », ne fut, quant à elle, démolie que très probablement en 1790. Avec elle, disparaissait l’un des monuments qui faisaient la fierté des Havrais. Située au carrefour des actuelles rues de Paris et Richelieu, elle fut remplacée par la place à qui l’on donna aussi le nom du cardinal, en son temps gouverneur du Havre.
Au long de la Grande Rue Saint-Michel, qui conduisait de la porte d’Ingouville au Grand Quai, on trouvait, à l’est, la place de Canibal (ou des Cannibales), l’actuelle place du Vieux Marché, que des lettres patentes de 1754 avaient donné des directives visant, par la mise en place d’un plan d’ensemble, à en améliorer l’aspect. Un plan qui, disons-le tout de suite, n’atteignit que partiellement ses objectifs.
Parallèlement, la ville entreprend la reconstruction du prétoire (actuel Muséum d’Histoire Naturelle) dont le bâtiment menaçait ruine. Après des années d’études et de réflexions, la première pierre de la nouvelle construction est finalement posée le 4 septembre 1758.
Toujours à l’est, s’élevait l’église Notre-Dame. Achevée officiellement en 1636 (le fut-elle un jour vraiment ?), elle n’a guère changé à l’époque qui nous intéresse. Les bombardements de la flotte anglaise et hollandaise de 1694 et de 1759 lui ont bien fait subir quelques dommages, mais elle fut à chaque fois remise en état. En 1777, elle a reçu de nouvelles cloches dont l’une (la principale) portait une inscription dédiée au Roi Louis XVI et à la Reine.
De l’autre côté de la rue Saint-Michel, face à l’église, se tenaient les bureaux des Messageries Royales. On les devine sur une gravure représentant la visite du Roi Louis-Philippe au Havre du 19 au 21 mai 1831. Situés initialement rue du Grand-Croissant, ils furent transférés en 1785 Grande Rue Saint-Michel. La diligence partait (et arrivait ?) quotidiennement, sauf le samedi.
À l’extrémité de la rue Saint-Michel, on débouchait sur le Grand Quai et la place d’Armes. Au centre de la place, s’élève une fontaine de forme carrée, surmontée d’un socle cubique sur lequel on pouvait distinguer notamment les armes de la Ville et celles du Roi. Elle avait été autrefois ornementée d’une statue à l’effigie du Roi-Soleil.
Au sud, la « grosse » tour François 1er projetait son ombre imposante sur la place. Elle la projettera jusqu’en 1862, année où fut entreprise sa démolition pour élargir l’entrée du port. Face à elle, de l’autre côté de la place, se tenait l’hôtel que s’était fait construire le premier gouverneur de la ville, Guyon Le Roy, seigneur du Chillou, et dont la ville avait fait sa maison commune vers 1550. Puisque François 1er, puis Henri II, y avaient séjourné, les Havrais l’avaient rebaptisé « logis du Roi ». À l’ouest de la place, adossé à la muraille et proche de la porte du Perrey, voici la résidence du lieutenant du Roi, une élégante bâtisse construite en 1753 dans le but de donner au représentant du Roi dans la ville une résidence digne de son rang. Sa majestueuse façade dominait le perrey d’Ingouville et le rivage. La Bourse des négociants, blottie entre la grosse tour et la porte du Perrey, avait été élevée en 1784 en réponse la demande insistante des négociants, las de tenir leurs réunions sur la place, en plein air et par tous les temps. C’était une sorte de péristyle de plain-pied avec une cour plantée d’arbres et entourée de grillages de bois.
Plus à l’est, à l’angle du Grand Quai et du quai Notre-Dame, le bâtiment des Fermes Royales, les futures Douanes, a été édifié en 1754. C’est là que résida le marquis de La Fayette de juillet à octobre 1779, entre deux voyages en Amérique, et c’est là qu’il reçut des mains du petit-fils de Benjamin Franklin l’épée d’honneur que lui avait décerné le congrès américain en reconnaissance des services rendus à la cause des jeunes Colonies-Unies.
Depuis que Colbert avait décidé sa création, en 1669, l’Arsenal de la Marine occupait la totalité du vieux bassin, notre bassin du Roi. L’entrée du bassin avait été élargie pour répondre au volume sans cesse croissant des navires qui s’y réfugient et il avait été doté de nouvelles portes. De hauts murs avaient été édifiés tout autour du bassin « pour éviter les divagations des ouvriers ». De 1776 à 1780, le magasin général, victime des affres du temps, avait été, pour une large part, reconstruit par l’architecte Paul-Michel Thibaut.
Le quartier Saint-François n’a, pour sa part, guère changé depuis sa création au XVIe siècle sous la houlette de l’architecte siennois Jérôme Bellarmato. Peu à peu, les négociants et les armateurs s’y sont installés, y ont construit de beaux immeubles, reflets de leur statut social et de leurs fortunes. Au début du XVIIIe siècle, les Dubocage père et fils font l’acquisition de terrains situés derrière l’église sur lesquels la demeure que nous connaissons sous le nom d’« Hôtel Dubocage » devait déjà exister à l’époque. En 1724, la Compagnie des Indes installe un atelier de fabrication rue du Galet (aujourd’hui rue Jérôme Bellarmato), dans les locaux de l’ancien jeu de paume du quartier Saint-François. C’est en 1726 que fut construit la Manufacture des Tabacs, un grand bâtiment en forme de quadrilatère, élevé autour d’une cour, sur l’emplacement précédemment occupé par l’Hôtel des Monnaies. En 1780, Paul-Michel Thibault, qui fut, en autres, le maître d’œuvre de la reconstruction du magasin de l’Arsenal et de l’édification des phares de la Hève, se fait construire, sur les bords du quai de l’Île, l’immeuble que tous les Havrais connaissent aujourd’hui sous le nom de « Maison de l’Armateur ».
Construction entreprise dans la seconde moitié du XVIe siècle, l’église Saint-François fut véritablement achevée en 1687. Durant trois siècles, ce ne fut qu’une simple chapelle dépendant de la cure de Saint-Michel d’Ingouville. Un simple vicaire y officiait et cette situation perdurera jusqu’à la Révolution de 1789.
C’est le cardinal de Richelieu, devenu gouverneur du Havre en 1628, qui avait décidé de la construction d’une nouvelle citadelle qui viendra se substituer à celle de Charles IX, jugée, à tort ou à raison, obsolète et inefficace. Il s’agissait, nous dit Claire Étienne-Steiner, d’un « quadrilatère bastionné comprenant une place d’armes, un magasin à blé, le logis du Roy, des huttes simples et doubles, une forge, un magasin à poudre, un magasin à câbles, une salle d’armes, des écluses et une chapelle ». C’est sur cette citadelle que les émeutiers havrais se cassèrent le nez le 15 juillet 1789 avant de se rabattre sur le magasin de l’Arsenal où ils purent s’approvisionner en armes et en munitions…
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- Oeuvre déclarée complète, relue et corrigée par son auteur.
- Les émeutiers du Grand Quay